Ironie de l'histoire: comprendre le dialecte bavarois constitue une sinécure si vous n'êtes pas originaire de cette région et des sous-titres peuvent être nécessaires pour mieux comprendre les ressortissants d'un Land qui affiche volontiers ses particularismes. Les chrétiens-sociaux de la CSU, la branche bavaroise des conservateurs allemands, sont depuis toujours connus pour leur côté baroque et des provocations régulières. Des propositions et des déclarations tonitruantes font régulièrement la une des journaux et mettent un peu de piment au sein d'une grande coalition ronronnante où l'opposition est réduite à la portion congrue. Le sujet brûlant des derniers mois en Allemagne, ce n'est pas tant l'Ukraine ou des investissements insuffisants mais le projet des Bavarois de faire payer les seuls étrangers circulant sur les routes allemandes ce qui oblige à des solutions des plus grotesques pour être un tant soit peu conforme au droit européen.

Il y a quelques mois, la CSU avait lancé une campagne contre le "tourisme social" et s'en prenait à des ressortissants européens -avant tout des Bulgares et des Roumains- accusés de venir s'installer en Allemagne uniquement pour encaisser les aides sociales. Et la nouvelle proposition va dans la même direction : lutter en surfant sur des thèses droitistes contre la concurrence du nouveau parti eurosceptique Alternative pour l'Allemagne qui ne se contente plus des thèmes européens mais dénonce la présence en Allemagne d'étrangers insuffisamment intégrés ou trop criminels.

La dernière proposition de la CSU a provoqué des réactions négatives et des commentaires mordants, mais aussi des railleries tous azimuts sur les réseaux sociaux. Le parti a finalement mis de l'eau dans sa bière et atténué sa proposition destinée à être débattue lors d'une rencontre du parti en fin de semaine. L'utilisation de l'allemand est désormais prônée par les étrangers "dans la vie de tous les jours". Un vaste programme de recrutement de mouchards et l'installation de micros ne seront donc plus nécessaires pour contrôler notamment les trois millions de Turcs, la première minorité étrangère d'Allemagne.